L 'échec de la punition

Ce qui est à la base de la raison pour laquelle les "punitions" sont peu efficaces, c’est l’attitude de l’homme envers l’animal. Les gens aiment penser que les animaux sont motivés par nos souhaits et que leur montrer qu’on n’est pas content, marche pour les motiver à être sages. Un animal ne comprendra jamais que l’homme serait prédestiné à être son maître. Il peut apprendre à l’aimer, il peut apprendre à le respecter ou le craindre, mais il continuera toujours à faire ce qui est dans son propre intérêt. Si un animal "obéit", c’est qu’il est motivé par l’espoir d’être récompensé ou par la peur d’une punition.




En fait, punir pour lui montrer son mécontentement n’est qu’un geste hiérarchique sans réelle valeur éducative. Dans le meilleur des cas l’animal apprendra à éviter des conflits avec la personne en question. Dans le pire, il apprendra le contraire.




Ce que les gens n’arrivent pas à comprendre concernant la punition, c’est que, tout bêtement, en râlant et en tapant un animal on lui apprend uniquement qu’on est une personne râleuse qui tape… En fixant son regard sur lui, en montant le ton et en criant des menaces et en se mettant en colère, on s'interpose entre le comportement et la punition. Cela empêche l’animal de comprendre la relation entre son comportement et ses conséquences. Avant tout, il fera l’association entre la punition et la personne qui la donne.




En plus, les gens qui se mettent en colère ne se limitent pas à ne "travailler" qu’un comportement cible. Un jour au centre équestre j’ai vu une dame, lors du curage des pieds, taper son cheval qui tardait à lui donner son pied (l’antérieur gauche) et quand il donnait le mauvais pied (l’antérieur droit). Ensuite la dame changeait de côté et punissait quand il hésitait à lui présenter de nouveau ce pied droit. Par la suite elle lui donnait des baffes quand le cheval donnait les pieds au moment où elle mettait des bandes, quand il bougeait ou quand il ne bougeait pas… A nouveau, de cette façon il n'est pas possible pour l’animal d’associer les punitions à ses propres comportements. Ce cheval avait sans doute compris la même chose que moi : "dame désagréable".




On tente de "dresser" nos animaux en essayant de leur faire comprendre ce qu’on veut d’eux… Un animal ne sera jamais motivé par ce que l’autre veut. Ce n’est pas qu’il s’en moque, c’est que, dans son esprit "zoomorphiste", il n'a aucune idée que son "maître" puisse vouloir une autre chose que ce qu'il veut lui même.
Les animaux ne se voient pas comme nos serviteurs naturels ! Ils ne font que ce qui leur convient. Si l’on veut façonner leur comportement, il faut les motiver en exploitant justement cette dernière chose ! Ils font ce qui leur plaît, apprenez leur donc à aimer vos consignes...




A la base de notre attitude punitive, se trouve l’illusion absurde que l’homme serait le maître des animaux. L’homme se flatte de l’idée que les animaux auraient envie de se plier à ses souhaits. Ainsi, l’animal qui n’ "obéit" pas défierait l’autorité humaine et mériterait donc d'être puni.




Il y a encore pire. En tant qu'éducateur canin, je travaille par la récompense. Lors d’une première entrevue les clients voient qu’en deux minutes on arrive à faire, grâce à quelques friandises, ce qu’eux-mêmes n’ont pas réussi depuis l’acquisition de leur chien. Pourtant, presque systématiquement on me demande "et quand ce sera terminée, la récompense ? Ou, "mais comme ça il apprendra à écouter pour la bouffe et pas pour MOI !". Je ne pense pas que jamais au club canin ou au centre équestre les gens demandent : "Et quand ce sera terminé, l'étrangleur, la cravache ?" Ou, "comme ça il écoutera pour éviter la punition et pas pour moi !". On a peu de scrupules à punir très sévèrement les animaux que l’on dit adorer et on préfère que le don d'une carotte reste un geste "royal" pour montrer le contentement de son maître après le travail. Etrangement on semble trouver plus beau qu'un animal obtempère contre son gré plutôt, que parce qu’il en a envie.




Malgré tout ce que je viens de dire, la punition positive, dûment appliquée comme mesure éducative, peut certainement être une technique très directement efficace à court terme pour décourager un comportement indésirable. Pour cela une première condition (entre autres) est que l’animal la voit comme conséquence de son propre comportement, sans l'associer à son "maître". MAIS, il restera toujours un problème insurmontable concernant cette façon de travailler : même si les punitions sont "correctement appliquées", quand on y a recours régulièrement, il sera inévitable que à la fin l’animal ne les associera pas uniquement à ses "erreurs". Il ne manquera pas de les associer aussi à la situation du travail, donc à la personne. En punissant on privera l’animal de son envie d’interagir avec l’homme en écoutant ses ordres, on se privera d’un partenaire gai et pétillant.




Depuis 1985, grâce au livre "Dont shoot the dog" de Karen Pryor, les résultats pratiques d’une trentaine d’années de recherche scientifique sur le dressage d’animaux, motivée par des intérêts militaires et commerciaux, sont accessibles à tous : "rien de plus efficace que le renforcement positif moyennant un signal annonciateur, le "clicker training".
Comme pour les dauphins, le clicker training serait vraiment idéal pour, par exemple, perfectionner les sauts des chevaux d’obstacle et donnerait à l’équipe qui s’en servirait un énorme avantage par rapport aux concurrents. Mais, même dans le monde de la compétition au plus haut niveau, les gens préfèrent ignorer et rester sur leur tout petit nuage.


Joris Loeff






n° 00048472


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Parce que le bien-être de mes lecteurs me va au coeur, voici encore un peu sur la punition...










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